De la simple application de partage d’inspirations et de tendances, magnifiées à grands coups de filtres, le réseau social Instagram est en passe de se transformer en l’une des plus redoutables marketplaces « mode et beauté ». Actuellement en test aux Etats-Unis, la brique transactionnelle « Checkout », permettant aux utilisateurs d’acheter en ligne les produits des marques sans quitter la plateforme, laisse peu de doutes quant à son évolution. Un lancement à grande échelle, sur l’ensemble du réseau ferait d’Instagram, déjà champion de la prescription, LA place de marché phare des acteurs mode et beauté…
Instagram : un fonctionnement « digne » de celui d’une marketplace
« CHECKOUT – Buy from brands without leaving Instagram » : la promesse est séduisante pour les férus de mode, déco et beauté. Résonne-t-elle marketplace ? Oui, et à plus d’un titre !
En effet, la version bêta de l’application, accueille déjà une sélection du catalogue produits de plus de 20 marques depuis mars 2019, allant d’enseignes grand public comme Zara et H&M, à de luxueux noms tels que Prada, Balmain ou Dior. Les annonceurs d’hier deviennent ainsi les marchands tiers d’aujourd’hui, surfant sur l’évolution de la fonction « Shopping » du réseau social, mise en place depuis mars 2018 : un système de tags poussés dans le fil d’actualité des abonnés, permettait aux marques de mettre en avant jusqu’à 5 articles. Chaque étiquette virtuelle, reconnaissable à son icône « panier », contenait une fiche produit simplifiée pointant vers le site e-commerce de la marque, où était finalisé l’achat.
Source : Presse Instagram
Désormais, il suffit de cliquer sur ce tag, renommé pour l’occasion « Checkout on Instagram ». Puis, comme pour tout achat en ligne, taille, couleur, ainsi que d’autres options le cas échéant, sont sélectionnées. Enfin, le règlement est effectué directement sur la plateforme, sans sortir sur le site du vendeur. Les moyens de paiement acceptés à ce jour sont Visa, Mastercard, American Express, Discover et Paypal. Entre-nous d’ailleurs, la plateforme préparait, depuis septembre 2018, ses utilisateurs à aller jusqu’au bout de leur expérience d’achat sans quitter l’univers d’Instagram, en leur proposant d’enregistrer une carte de crédit … pour « faciliter l’achat des produits tagués, sur les sites annonceurs ». Ingénieux !
Comme pour toute marketplace, il est possible d’effectuer une commande multi-vendeurs sur un seul formulaire. Seuls le nom, l’email, et les informations de livraison sont nécessaires pour la première inscription . Ils sont ensuite transférés au vendeur pour l’expédition, sachant que les notifications relatives à la commande et à la livraison sont effectuées via Instagram, qui conserve également les données de paiement. Enfin, c’est par Paypal que transitent les fonds du client vers le compte des marques. Notons que la « marketplace sociale », étant déjà en partenariat avec Shopify, BigCommerce, ChannelAdvisor et CommerceHub, les vendeurs pourront connecter aisément leurs systèmes e-commerce à la plateforme, une fois le paiement Instagram généralisé.
A ce titre, le business model devrait être basé sur une commission prélevée sur les ventes, d’après un article paru dans LSA, mais dont le pourcentage est pour l’heure inconnu.
Instagram : entre image, communauté et prescription, une force de frappe hors du commun
Instagram ne comptait pas moins de 1 milliard d’utilisateurs en 2018. Des utilisateurs qui, a 72%, « avouent » effectuer leurs achats mode, beauté et décoration, en fonction de leurs inspirations puisées sur la plateforme, au gré des posts de leurs amis, des marques et des influenceurs. Ajoutons également que 400 millions d’entre eux regardent des Stories chaque mois, 80% suivent une entreprise et ⅓ des Stories les plus regardées proviennent des marques. Le pouvoir de prescription auprès des communautés est phénoménal !
Et c’est sur cet atout natif, qui s’est développé au cours des années, et qui représente la force différenciante de cette marketplace, que les marques comptent bien s’appuyer. Pour le chausseur Jonak par exemple, c’est près de 15% de son chiffre d’affaires online qui vient d’Instagram ! Un atout d’autant plus attractif, que la plateforme se situe en amont du propre tunnel de conversion des marques, là où se crée le désir et naît la propension à l’achat d’impulsion. Avec un parcours client ultra fluidifié et plus simple – 3 clics seulement étant nécessaires pour valider la commande – l’effet « driver » de ventes e-commerce, avec un taux de conversion en ascension libre pour les marques est juste énorme !
Pour preuve, déjà 130 millions d’utilisateurs cliquent chaque mois sur les étiquettes virtuelles des articles … ils étaient 90 millions en 2018 au même moment.
Et puis n’oublions pas non plus qu’Instagram offre un environnement connu et sécurisé à ses utilisateurs …une réassurance et une caution à ne pas négliger.
Par ailleurs, la filiale de Facebook met en œuvre des moyens conséquents : les équipes sont renforcées aux Etats-Unis par des responsables catégorie, le dispositif de paiement est en développement et en amélioration constants, et un SAV de compétition est en cours de constitution. En effet, les marques perdant la main sur le paiement – une étape stratégique dans le processus d’achat – et les Instagramers restant sur le réseau social, l’expérience client proposée par la plateforme se doit d’être plus qu’à la hauteur, et sublimer du début à la fin le parcours d’achat, sans se contenter de le raccourcir. Pour le moment, nous n’en connaissons ni le coût ni les effectifs, l’objectif d’Instagram étant pour l’heure, de créer des habitudes et des automatismes auprès de ses utilisateurs. Mais les commissions prélevées sur les ventes devraient vite constituer une source de financement indispensable, en sus des revenus publicitaires !
Malgré l’introduction d’une commission sur les ventes, l’abandon d’une certaine partie de la DATA au profit de Facebook et d’une perte de connexions sur leur e-shops, à travers Instagram version marketplace, les marques bénéficient, d’un parcours client sans friction, d’un potentiel de conversion inespéré et d’une visibilité sans commune mesure.Un booster de ventes en ligne qui vaut bien quelques sacrifices. Nul doute que la fonctionnalité « Check Out » sera un succès. Une fois les stratégies de revenus bien définies (paiement au clic, commission sur les ventes de la marketplace…) et le paiement généralisé au reste du monde, Instagram devrait rapidement devenir un acteur e-commerce significatif des domaines mode, beauté et décoration. Réponse d’ici quelques mois !